Chronique - L’estime de soi
Par Dre Andrée-Anne Bouvette-Turcot, psychologue
Je parle souvent ici de l’importance de s’accueillir avec bienveillance et autocompassion. Mais comment faire lorsque l’on ne s’apprécie pas beaucoup ou, en d’autres termes, que l’on a une faible estime de soi?
En psychologie, l’estime de soi fait référence à l’appréciation globale, positive ou négative, qu’une personne porte envers elle-même. Cette appréciation globale n’est pas seulement basée sur le jugement qu’on pose sur soi, mais aussi sur notre perception de ce que les autres pensent de nous, sur nos émotions (fierté, honte, etc.), sur nos propres pensées (notre discours intérieur) et sur nos comportements (initiative, approche, retrait, évitement).
Les origines de l’estime de soi
L’estime de soi se construit au fil de nombreuses expériences, et ce, dès les premières années de vie. Plusieurs facteurs entrent donc en ligne de compte pour forger nos premières appréciations de nous-mêmes. Le regard de nos parents et de nos proches, la sécurité du lien d’attachement avec nos parents, les expériences d’affection, de validation et de soutien, le tempérament, les expériences de rejet, les relations intimes au cours de la vie adulte et les traumatismes vécus sont des éléments importants qui influencent le développement et la fluctuation de l’estime de soi. Bref, l’estime de soi se construit en relation avec les autres.
Les fonctions de l’estime de soi
L’estime de soi contribue à notre développement et à notre épanouissement comme être humain. Avec une estime personnelle solide, il est plus facile de se faire respecter, de s’affirmer et de faire respecter ses valeurs. Cela favorise donc également les relations interpersonnelles. Une plus forte estime de soi est aussi associée à une augmentation de la persévérance et de la capacité à affronter des défis et à surmonter de l’adversité. Cela s’explique, entre autres, par une meilleure connaissance de soi, de ses forces et de ses faiblesses. Le moral et l’humeur s’en trouvent, par le fait même, plus épargnés en périodes de turbulences puisqu’une estime de soi solide permet de ne pas s’effondrer en cas d’erreur ou d’échec. Enfin, cela permet aussi de modérer le perfectionnisme (et ses conséquences néfastes qu’on connaît).
Les conséquences d’une faible estime de soi
Les gens aux prises avec une faible estime de soi en viennent souvent à développer des mécanismes de compensations (à fort prix) pour la dissimuler. Plusieurs symptômes néfastes peuvent ainsi en découler. Pensons, entre autres, à la peur (peur du rejet, peur de l’échec, etc.), au stress, à l’anxiété, à des symptômes dépressifs, etc. Les relations interpersonnelles peuvent également être affectées, par exemple par une augmentation de la jalousie et de l’envie et/ou des comparaisons fréquentes avec les autres et de la difficulté à accepter la critique et les commentaires constructifs. En outre, avoir une faible appréciation globale de soi-même génère souvent la croyance d’être indigne d’amour et on tend ainsi à vouloir se protéger et à avoir de la difficulté à se laisser aimer.
Comment renforcer son estime de soi?
La bonne nouvelle, c’est que l’estime de soi est un concept fluide. Il est donc possible de la renforcer. Tout d’abord, il incombe d’apprendre à reconnaître et à identifier certains comportements visant à nous protéger (ex. : tenter de dissimuler des côtés de soi, se justifier à outrance, éviter certaines situations par peur de l’échec, etc.). Ensuite, on tente d’attraper au vol son discours interne négatif et auto-critique ainsi que les formulations sans nuance (ex. : je ne suis bon à rien). Cela permettra de favoriser l’émergence d’un discours interne bienveillant et empreint d’autocompassion et de nuances. Essayez aussi d’accepter les compliments sans les réfuter ou les atténuer. Osez vous exposer graduellement à vos peurs de l’échec. Affirmez-vous et exprimez vos besoins et vos valeurs. Finalement, réduisez le plus possible votre tendance à vous comparer aux autres (cela passe aussi parfois par une baisse de consommation des médias sociaux). Et…donnez-vous le droit à l’erreur et acceptez vos imperfections!